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Mlle Pied
14 octobre 2010

- La séduction -

- La séduction -

 

 

 

 

cruiser

 

 

 

 

« Alors, t’écris toujours sur nous ? »

Ahhh, adorable colocataire! Son sport favori : bavarder à propos de nos différences.

      - Oui, en tout cas, j’essaie..

      - Et t’as pensé parler de la drague ? Parce qu’il y aurait des milliards de choses à dire…

      - Oui, j’y ai déjà pensé. T'as pas tort, c’est vrai que ce serait une bonne idée.

      - Mais oui! Justement, si je t’en parle, c’est qu’hier soir, je suis allée à une soirée où y’avait un mec trop trooooop mignon. On a discuté au moins une heure de tout et de rien et puis, je ne sais pas pourquoi, mais…

La tasse de café dans la main droite, la gauche qui bat l’air, elle me raconte comment tout ça c’est soldé par un échec. Elle n’a jamais su si elle lui plaisait ou pas. Il ne lui a même pas demandé son numéro. Elle en conclut que les Québécois sont difficiles d’approche et que, depuis son arrivée, on ne l’a jamais si peu draguée. Elle fait la moue et déclare : « Ici, les mecs me font sentir moche... »

Bon, bon, bon… Un constat qui semble un peu rapide mais que je n’entend pas pour la première fois: « Mais bordel, qu’est-ce qu’ils ont à la place des couilles vos mecs ? Des raisins Sunmaid ?»

 

Y aurait-il un fond de vérité ? Possible. Entre le vrai et le faux se trouve les clichés, les apparences, nos expériences et celles des autres. Le tout forme un bel assemblage de nuances dans lequel il n’est pas évident de se dépatouiller. Mais comme le sujet m’intéresse soudainement, je me dis : analysons la situation. Et vu l’étendue du sujet, laissons-nous le droit de glisser le pied dans les généralités pour le plaisir.

 

Donc, si je devais le comparer au Français, je dirais d'emblée que le Québécois est plus maladroit en amour, plus sensible, plus respectueux, plus fidèle, moins joueur et au final, moins séducteur. Avant d’écrire ce texte, j’ai pris la peine de bâtir un petit questionnaire sur le sujet. Quelques patients cobayes, issus des deux cultures, ont accepté de le subir. Les résultats de mes entrevues confortent majoritairement ce que je crois : le Québécois recherche avant tout la stabilité, il a besoin d’avoir l'esprit tranquille. Le Français ; un joyeux épanouissement, il a besoin d’être stimulé.

Une fois qu’on aura réussi à le mettre en couple (il y aura d’abord la parfois longue période complications et ambivalences, laquelle n’est pas de tout repos), le mâle d'ici sera prêt à surmonter beaucoup de différends ainsi qu'à faire d’importants compromis pour ne pas perdre cette sacro-sainte sécurité sentimentale. Ici, les désirs sont utopiques, nous attendons de très jolies choses de l’amour. Pourtant, ce qui est paradoxal c’est que la relation rêvée est des plus basique. Nous voulons que ce soit beau, chaud, vrai et simple. Très, très simple. Le chichi importe peu ou pas. À la limite, il dérange.

La séduction ne devient donc parfois qu’un processus obligé servant à nous porter vers quelque chose de plus sérieux, de plus stable. Le flirt futile et sans lendemain n’est pas spécialement glorifié. De toute façon, séduire nous donne mal au ventre et nous préférons de loin l’acte de prendre la fuite à celui de prendre son courage à deux mains.

 

En ce qui les concerne, les Français me donnent l’impression très forte d’être plus épicuriens. La relation doit, outre les critères de base de la majorité des relations, les garder en éveil et les amuser. Pour eux, la notion du prince charmant et de l’amour-romantique-qui-dure-toujours est désuète. Alors que beaucoup de Québécois m’ont avoué leur inconfort et leur ignorance dans le domaine des sentiments (comment ne pas le remarquer…), les Français qui prennent la chose moins gravement clament leur amour des jeux de la séduction, de la sophistication du flirt et beaucoup d’entre eux accordent peu d’importance à la fidélité. Ayant moins le sens de la famille que nous, il est compréhensible de voir ainsi des satisfactions à tendance plutôt personnelles primer. La déliquescence, mes amis !

 

Manon, une « pévétiste » de 28 ans m’a dit : « Chez moi, l’homme aime plaire. Il va inviter une femme dans un bon restaurant, être charmant avec elle, discuter pendant des heures et la séduire de manière savante. Ça va être agréable.. Tout sera magique jusqu’à ce que l’homme se sauve, poussé par sa peur de l’engagement. Ou encore, jusqu’à ce qu’elle apprenne qu’il est marié. » Peut-être que cette vision explique parfois pourquoi les Françaises sont plus froides que nous ? Parce qu’il est vrai qu’elles le sont. L’évidence est mondiale, ce n’est même plus un point à discuter.

Ici, les femmes peuvent rarement se permettre un tel détachement devant leurs pairs masculins. Pour la survie de l’espèce (notez ici une légère exagération), il faut bien qu’un des deux camps fasse les premiers pas !

Si les Français sont si portés à faire les premiers pas c'est qu'ils sont extrêmement sûrs de leurs capacités. Une étude menée par le cabinet YouGov sur plus de 2 000 spécimens, montre qu'ils se considèrent comme étant les rois de la séduction. 43% des hommes sondés estiment les hommes de leur pays comme étant les plus romantiques, 42% les plus drôles, 38% affirment être les meilleurs amants et 33% les plus intelligents. Ce qui me fait rire, c'est qu'en revanche 78% des Françaises croient que les hommes les plus intéressants se trouvent hors du pays, principalement en Italie... Selon elles, ce serait donc eux les meilleurs séducteurs.

Comme quoi l'herbe semble toujours plus verte ailleurs!

En ce qui à trait aux différences Franco-Québecoises, je me suis demandé comment elles s'étaient forgées. La première réponse logique qui m'est venue était: l’âge de nos cultures. Il n'est pas nécessaire de réfléchir beaucoup pour réaliser que nous n’avons aucunement le même  «background» dans le domaine des relations amoureuses. On pourrait presque dire qu’ici, nous avons moins de pratique. Comme si nous étions jeunes, adolescents avec tout ce que ça implique d'insécurités et de malaises. Quand on y pense, depuis quand les Québécois ont-ils le « droit » de pouvoir séduire seulement pour le plaisir de la chose ? Depuis quelques décennies seulement. Ça n’a pas fait partie de nos mœurs avant le milieu du XXième siècle. Sous le joug de quoi étions-nous avant cette libération? La religion. Et avant encore ? Le travail d’un soleil à l’autre. Et si on recule encore ? Oh, là, il n’y avait quasiment rien. Des épinettes, des caribous, des mouches et quelques tribus. Regardons-nous, il y a trois cents ans. Qu’était la vie ici ? C’était nos débuts, l’époque où les côlons devaient se protéger et se battre contre les Iroquois hostiles qui, à eux seuls, provoquaient plus du tiers des décès, les maladies comme le choléra dont on ignorait les remèdes et le froid, celui qui mord et s’agrippe la moitié de l’année. Durant cette période rustique, même les maringouins étaient un problème sérieux: « Il y a des personnes qui sont contraintes de se mettre au lit, venant des bois, tant elles sont offensées (par les maringouins). J’en ai vu qui avait le cou, les joues, tout le visage si enflé qu’on ne voyait plus leurs yeux. » Relations (1632-1641), Père Paul Lejeune.

Il fallait défricher, construire et accroître la population (à peine plus de trois milles habitants au début du dix-huitième siècle). Ensuite, nous avons dû nous battre (et perdre) contre les Anglais. Nous avons continué de nous chamailler avec eux pendant de longues années afin de préserver notre langue et nos droits. Il a aussi fallu obéir aux représentants religieux qui nous forçaient à faire une bonne vingtaine d’enfants par famille. Après ça, nous avons trimé comme des bêtes pour arriver nourrir toutes ces bouches. Et n’oublions pas, que parallèlement à tout ça, il était impératif pour notre fierté de se forger une identité à laquelle se raccrocher. Alors, ceux qui nous ont précédés auraient-ils eu le temps et l’énergie de faire la cour à qui que ce soit ? Peut-être que oui, car l’humain est ainsi fait qu'il ne peut s'empêcher de tomber amoureux. Pourtant, j’imagine facilement le déroulement de l'opération : une dizaine de minutes volées par-ci par-là, des soupirants accoudés sur les piquets d’une clôture et, en arrière-plan, toujours l’espoir de se marier et de fonder une famille avant que le prêtre ne vienne nous sermonner encore une fois dans notre propre cuisine. Les prétendants avaient d’autres soucis que celui de bien tourner leurs phrases. Ce n’est pas non plus quelques auscultations rapides faites par curiosité avec les cousins\voisins\chèvres dans les bottes de foin qui nécessitaient un grand effort de séduction. Je réitère, les Québécois sont des gens simples…

Loin de nous, la France est, au dix-huitième siècle, fort probablement le pays le plus riche du monde. Sa supériorité militaire (attendez un peu plus tard que Napoléon arrive et soumette presque tout l’Europe), sa bourgeoisie, ses théâtres, ses écrivains, et sa nourriture impressionne. Même si, là-bas aussi, la vie pouvait s’avérer difficile (guerres, révolutions, épidémies, pauvreté, port de la perruque...), il y avait sans cesse des débats politiques importants, une population plus grande, des cabarets, du théâtre ambulant, des révolutionnaires bref, une stimulation constante. On discutait, on bouillonnait. Et surtout, la religion se faisait moins imposante. On se parfume, on sort dans les cabarets, on séduit, on couche et on attrape la syphilis en se doutant bien que le diable ne nous attends pas au prochain coin de rue pour nous botter les fesses jusqu’en enfer. Il y a des prostitués et des maisons closes. À cette époque, on a déjà commencé à décortiquer l’amour, le sexe et la séduction. Molière est mort depuis longtemps mais son ironique vision de la femme bourgeoise continue de vivre (et de faire rire) dans les livres et les théâtres. Partout, il y a des gens qui pensent, qui créent, qui philosophent. C’est l’époque de Rousseau, du Marquis de Sade, de Bach, de Diderot, de Mozart, de Voltaire, de Montesquieu et j’en passe… Une culture importante, qui est là pour rester, prend forme.

J'ai fait un saut en France dernièrement. Oui, j’y ai tout de suite vu la même différence que ma colocataire. Ça frappe. Il se dégage des hommes une saine confiance mêlée à un sens du jeu que je trouve particulièrement attirante. Ils maîtrisent l'art de converser et de mettre à l'aise leur vis-à-vis. 

Là-bas, l'envers de la médaille, c'est les hommes super intenses qui abordent sans cesse les femmes en pleine rue. Même si on m'avait prévenue, ça m'a particulièrement étonnée. Parfois drôle, parfois lourd mais toujours surprenant. Ici, ça n’arrive quasiment jamais. En fait, vous le remarquerez mesdemoiselles, nos hommes se laissent aller à la « cruise » de rue seulement dans la sécurité de leur voiture. N'est-il pas plus aisé de s’enfuir de cette manière? Par hasard, ce ne serait pas pour ça qu’ici séduire ça s’apelle «cruiser»? Parce que ça se fait en char ? (On s'entend pour dire que ça ne vient sûrement pas de Tom Cruise !) Je trouve que cette manière de faire en dit long sur le tempérament de nos hommes. Honnêtement, les garçons, sans devenir des machos finis comme j'en ai vu à Marseille, un peu plus d'audace, ça ne serait pas mauvais. Je crois que ça nous ferait même plaisir! Au fond, il suffit juste abandonner un peu le cruise-control pour appuyer sur la pédale et foncer!

Vous savez ce que je ferai aujourd'hui ? Acheter le premier livre qui porte sur le malaise de la drague au Québec. Coécrit par Jean-Sébastien Marsan et Emmanuelle Gril, Les Québécois ne veulent plus draguer, encore moins séduire, expose l'hypothèse qu'au fond, les Québécois savent draguer. Le problème c'est qu'ils n'ont pas envie de le faire pour diverses raisons. Je sens que ça va me plaire. Je vous reviens là-dessus éventuellement, il y a tant de choses à en dire...

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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Commentaires
Y
Tu ne parles pas du féminisme. Les féministes est écrasé les hommes pour tout contrôler, et principalement, la relation amoureuse et séductrice entre l'homme et la femme.<br /> <br /> Chose certaine, les hommes seraient d'accord avec toi et les certaines femmes, qui n'ont pas peur de perdre leur statut de matriarcat, comme moi, le reconnaîtraient.<br /> <br /> Yogita
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